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    L'atelier de Nanou

    Proposition n°46

    - Phrases : l’endroit était vraiment désert - d’un mouvement machinal - au premier coup d’œil - sa théorie n’était pas la mienne - triste et fatiguée - avoir de la peine - Il ne bouge plus.

    - Mots ou expressions : tomber dans les pommes - vendre - calme - souvenirs - partir.

    - et/ou Thème : Adoption

    ***

    Veuillez excuser l'exceptionnelle longueur de cet épisode qui clôt l'histoire de Valentine Delpierre

    Révélations et fin heureuse

     

    Il a posé le tout devant moi. D’un mouvement machinal il caresse le médaillon. Il semble avoir de la peine, comme si d’anciens chagrins ressurgissaient. Et cette peine m’atteint plus que je ne saurais l’avouer. Ai-je le droit de le laisser raviver des souvenirs douloureux. Nous nous connaissons  si peu. Ce matin, il n’était pour moi qu’un inconnu loufoque et horripilant. Ce soir mon envie de partir s’efface devant celle de savoir  qui il est réellement. A-t-il deviné ? Sans mot dire, il se lève et vient s’asseoir à côté de moi.  Bien trop près pour ma tranquillité. Mon calme n’est qu’une apparence. Intérieurement, je tremble comme une feuille.

    Il fait glisser les deux objets devant nous. Puis il ouvre le médaillon et me le montre. Il contient une petite photo en couleur. Un portrait de femme… Elle me paraît triste et fatiguée. Au premier coup d’œil je sais qu’il s’agit de sa mère. La ressemblance entre eux  est frappante. Il ne bouge plus, guettant ma réaction.

    -C’est votre maman. Elle est très belle ! Vous lui ressemblez beaucoup.

    - Était… Elle est morte quand j’avais 10 ans. Dépression.Suicide.

    Il est en colère. Je serais prête à vendre la peau de l’ours sans l’avoir tué tellement j’en suis convaincue.

    - Elle a préféré mourir plutôt que de s’occuper de moi. Elle m’a laissé seul. Tu peux comprendre que je sois en colère ! Répond-il à ma question muette en passant au tu sans préavis.

    Je fais de même pour lui demander :

    -Et ton père ?

    -Je n’ai pas de père. Ce salaud a quitté maman quand il a appris qu’elle était enceinte. Ils n’étaient pas mariés. Je ne connais même pas son nom.

    -Tu devrais t’appeler Chapelain alors.

    -Je porte le nom de ma famille d'adoption.

    - Ce n’est donc  pas ta grand-mère qui t’a élevé ?

    -Elle n’en était pas capable. Alzheimer précoce. La seule chose qu’elle m’ait donné, c’est sa recette de biscuits !

    -Tu n’avais pas d’autre famille ?

    -Non. J’ai été placé en orphelinat. Deux ans. Puis Alfredo Paradis et sa femme Zita, m’ont adopté. C’est à cette époque que j’ai quitté le Québec pour la France. J’ai intégré le cirque où ils travaillaient. J’étais un môme révolté. Je passais mon temps à me battre avec les autres gamins. Alfredo m’a pris en main et crois-moi, sa théorie n’était pas la mienne à ce sujet. Il a été pour moi le meilleur des pères, sévère mais juste. Quant à Zita, c’est grâce à elle si je ne suis pas ignare. J’ai gardé ce cahier de texte où je notais en rechignant chaque cours prévu par l’un ou l’autre. Les arts du cirque avec mon père, les maths, la géo, le français et tutti quanti avec ma mère.  Alfredo est à la fois mon père et mon maître à penser. Il est le Monsieur Loyal du spectacle, mon partenaire dans le numéro de clowns et bien sûr il est voyant, comme tu  t’en doutes. Quand à ma mère adoptive, c’est un trésor de tendresse et de patience. Il lui en a fallu beaucoup avec moi ! Voilà Valentine, tu sais tout de moi ou presque mais avant de me dire ce que tu as décidé, je dois encore te montrer quelque chose.

    Il m’a emmenée sous le chapiteau. A cette heure tardive, l’endroit était vraiment désert. Ils ne devaient démonter que le lendemain soir, après une seconde représentation. Antoine m’a fait grimper par une échelle de corde, jusqu’à la petite plateforme d’où il démarre son numéro. J’aurais pu tomber dans les pommes tellement j’avais peur mais j’ai tenu bon, pour lui. Là, il m’a redemandé de l’épouser, et aussi d’accepter le poste d’institutrice itinérante. J’ai dit oui pour les deux. Nous avons scellé cet accord par un baiser fougueux.

    Moi, Valentine Delpierre, j’ai enfin trouvé l’amour et je sais désormais que les miracles existent. Aujourd’hui, je m’appelle Valentine Paradis. Antoine et moi, nous sommes les parents comblés de Valentin et de Mélodie, 3 ans tous les deux, qui ne tarderont plus à intégrer la classe ambulante de leur maman, avant d’apprendre avec leur père, le beau métier d’enfants de la balle.

    Zita et Alfredo sont les plus heureux grands-parents du monde.

    Quant à Hermine, je ne connais pas grand-tante plus gaga chaque fois que nous débarquons chez elle.

     

    Fin

    01/11/2022

    ©A-M Lejeune

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    L'atelier de Nanou

    Proposition n°45 

    - Phrases : de la terre - chevaux de trait - faire un pas de côté - une tasse de café à la main -médaillon renfermant un portrait - cahier de textes - il frotte ses mains.

    - Mots ou expressions : chapelain – atmosphère – trouver – intelligente – témoins.

    - et/ou Thème : Malbouffe 

     

    Décision

    Curieusement, je ne suis pas autrement surprise par sa proposition. Et il ne me faudra pas toute une année scolaire pour y réfléchir. Je ne vais pas faire un pas de côté mais plutôt un grand écart ! Voilà ce que la décision que je viens de prendre implique.

    Ce cher Antoine Paradis qui, jusqu’à présent m’a semblé capable de lire assez facilement dans mes pensées, m’a  l’air perplexe, voire décontenancé par mon manque apparent de réaction. Ne vient-il pas pourtant de m’inviter à envisager un changement radical de mon existence déjà passablement bouleversée ?

    Visiblement mal à l’aise, il frotte ses mains l’une contre l’autre, guettant sur mon visage impassible, une réponse qui ne vient pas. L’atmosphère entre nous est plus tendue que son câble de funambule. Qu’il est beau ce diable d’homme qui ignore encore l’effet dévastateur qu’il produit sur moi et sur mon jugement ! S’il a pu me trouver intelligente, que penserait-il de la midinette qui se pâme intérieurement devant lui  après l’avoir si copieusement houspillé ?

    N’y tenant plus, il se lève et se dirige vers la kitchenette au fond de la caravane. Il est bien installé ma fois ! Cuisine équipée, salon, salle de bain et chambre à coucher confortable je suppose parce qu’il ne m’a pas fait visiter ! On est loin des roulottes d’autrefois, attelées à des chevaux de trait. Je m’y vois finalement très bien dans cette spacieuse maison roulante ! Enseigner à des enfants tout en faisant le tour de la terre, quelle merveilleuse idée !

    J’entends Antoine fourrager dans les placards. Puis  je perçois le bruit de la cafetière électrique.  Mon hôte revient une tasse de café à la main et une assiette de biscuits dans l‘autre.

    -Goûtez, ils sont délicieux. C’est la recette de ma grand-mère maternelle. Marie Chapelain. Pas de malbouffe chez nous !  Si vous acceptez ma proposition, vous serez logée et bien nourrie, soyez en sûre !  On sait vivre nous, les saltimbanques ! Ne bougez pas, j’ai des choses à vous montrer.

    Et le voilà reparti, vers la fameuse chambre cette fois. Il est vite de retour avec un cahier de texte  qui semble avoir bien vécu et au bout de sa chaine d’argent, un médaillon renfermant un portrait, d’après ce que je peux en juger.

    -Ces objets, Valentine, sont les témoins de mon passé.

    21/10/2022

    ©A-M Lejeune

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    L'atelier de Nanou

    Proposition n°44

    - Phrases : de sa voix douce et chaude - papier et crayon en main - curiosité maladive - elle portait un tailleur blanc - fusiller mes souvenirs - une silhouette svelte - de bon matin.

    - Mots ou expressions : sentir le sapin - se faire la belle - sur la paille – railler - cailloux.

    - et/ou Thème : Passé

     

    La proposition

     

    De sa voix douce et chaude  en effet tintée de cet accent que je n’avais pas perçu avant ce soir, il vient de fusiller mes souvenirs. Celui de Valentin qui s’estompait déjà depuis quelque temps. Mais aussi celui de Loïc qui aurait pu être le père de mon enfant perdu, et celui du peu d’hommes qui ont brièvement traversé ma vie entre lui et ce pauvre fils renié, assassiné par son propre géniteur.

    C’est tout mon passé qui s’évanouit face à cet homme dont je découvre l’incomparable séduction. Papier et crayon en main, je pourrais le dessiner presque les yeux fermés. Une silhouette svelte sous le pull irlandais et le jean élimé, un visage tanné, taillé à la serpe, éclairé par des yeux d’un vert étonnant…Rien d’affecté en lui. Il est nature !

    Il éveille en moi, une curiosité maladive ! D’un  seul coup, j’ai envie, pire, j’ai besoin de tout savoir de lui. Cet anormal ! Je dois fuir, vite ! Ce matin, j’étais prête à le gifler. Ce soir, je voudrais… Ne jamais être venue. Et en même temps, je voudrais ne jamais repartir.

    Comme s’il lisait dans mes pensées, il garde le silence, me laissant l’observer.  Un demi sourire qui ne cherche pourtant pas à railler, étire ses lèvres.. Je suis tellement embarrassée que je ne suis pas loin de me ruer vers la sortie. Mais le gros bulldog endormi me bloque le passage. Il est si brave ce toutou !

    Alors d’une manière très surprenante, Antoine se décide à rompre le silence devenu très pesant pour moi. Est-ce que je l’entends vraiment chanter ?

    -Mon pauvre cœur commençait à sentir le sapin / Quand j’l’ai rencontrée de bon matin / Elle portait un tailleur blanc…/ Et puis ce soir, la v’là chez moi / J’avoue qu’j’en suis un peu pantois ! / Pourtant j’vois bien / Qu’elle meurt d’envie la demoiselle / De s’faire la belle ! / Mais pour qu’elle reste alors que dire ? / J’ai pas grand-chose à lui offrir / Et si je n’suis pas sur la paille /J’peux pas vraiment faire ripaille / Vu qu’dans mes poches y a qu’des cailloux

    Je suis tellement surprise que j’en éclate de rire ! Revoilà le clown fantasque qui m’a demandé de l’épouser !

    -C’est moche de se moquer d’un homme amoureux Valentine !  Lâche-t-il d’un ton faussement sérieux. Bien ! Si nous en revenions à ma proposition.

    - Ah non ! Vous n’allez pas remettre ça !

    - Ce n’est pas l’envie qui me manque mais il s’agit d’une autre proposition tout aussi sérieuse. Le professeur des écoles qui faisait route avec nous,  va prendre sa retraite à la fin de cette année scolaire. J’aimerais que vous acceptiez de le remplacer. Ça vous laisse le temps de réfléchir.

    20/10/2022

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    L'atelier de Nanou

    Proposition n°43

    - Phrases : la bouteille de caribou - il est laid à faire peur - danseurs de ballet - ne jamais s’arrêter - aller loin dans la vie - coup de génie - ressentir une certaine souffrance.

    - Mots ou expressions : autrefois – changer – enjamber – ouverture - la moutarde qui monte au nez

    - et/ou Thème : Ciel

    ***

    Invitation

    J’ai assisté médusée à ce numéro magique et poétique, incapable de quitter une seconde des yeux le prodigieux funambule qui évoluait sur son câble avec la grâce que possèdent les danseurs de ballet. Tout cela sans être assuré et sans filet ! Quelle folie !

    Une rose dans la main droite, il traversait le mince pont d’acier d’un ciel à l’autre en multipliant pirouettes, entrechats et autres sauts périlleux. Je dis d’un ciel à l’autre, parce que pour ajouter de la féérie à cette incroyable prestation, un décor de double ciel était projeté sur la voûte du chapiteau : à gauche l’azur  parcouru d’oiseaux en vol et le soleil à son zénith, à droite le firmament  étoilé, éclairé par la lune opaline. Parfois, coup de génie dans cette chorégraphie bien réglée, Tonio vacillait,  semblant perdre l’équilibre. Puis il  se rétablissait avec souplesse. Comme les autres, je retenais mon souffle, puis je soupirais de soulagement.

     A la fin de son numéro, sur un dernier saut périlleux arrière, s’il vous plaît.il  a glissé agile le long de la corde jusqu’à la piste, a salué le public en délire et s’est dirigé d’un pas sûr vers les gradins. Il m’a vue, m’a souri, a posé un baiser sur la rose rouge qu’il m’a offerte en me glissant très vite à l’oreille : « Ne partez pas, je vous en prie ! » 

    Je l’ai bien senti l’effet de la moutarde qui monte au nez mais ça n’a pas duré ! Comment résister à la supplication contenue dans son regard vert ? Un regard qui me faisait soudain ressentir une certaine souffrance, sans que je puisse en comprendre la raison !

    Je suis donc restée jusqu’au bout de cette très jolie représentation qu’un clown que j’ai reconnu sans peine, concluait avec son « maître » à la veste rouge.

    Après la traditionnelle parade autour de la piste, les artistes sont allés se changer et ont très rapidement démonté et plié le chapiteau rouge et jaune. « Ne jamais s’arrêter », telle semble être la devise des gens du voyage !

    Moi, j’ai attendu sagement, assise sur un ballot de paille, l’esprit encore égaré dans le double ciel du funambule..

    A présent me voilà dans sa caravane. Une invitation qu’il m’a faite avec une timidité inattendue  et que je n’ai pas eu le cœur de refuser ! Pour atteindre la banquette du salon, j’ai dû enjamber un énorme bulldog qui, dérangé, a levé vers moi sa tête patibulaire. L’ouverture de sa gueule baveuse a achevé de me terroriser ! De manière irraisonnée, je l'avoue, je crains les chiens et celui-là…

    - Ne craignez rien ! Il est laid à faire peur mais il n’y a pas plus brave toutou que mon Darius . Allez, je sors la bouteille de caribou qu’on casse un peu la glace ! C’est une boisson traditionnelle de chez moi au Québec.

    -Parce que vous êtes canadien !

    -Vous n’avez pas remarqué mon drôle d’accint

    - Euh… pas vraiment mais maintenant que vous le dites !

    -  Autrefois, il était un peu plus marqué. Je l’ai un peu perdu au fil du temps… Antoine Paradis, pour vous servir Valentine !

    - Alors comme ça vous êtes Tonio le funambule, Chico le clown... Vous démontez, donc vous montez aussi je suppose !

    -Eh oui !  Nul ne peut aller loin dans la vie d’un cirque, s’il refuse la polyvalence ! Mais on n’est pas là pour parler de moi. Valentine, j’ai une proposition à vous faire.

     

    19/10/2022

    ©A-M Lejeune

     

     

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    L'atelier de Nanou

    Proposition n°42

    - Phrases : son cœur battait à une vitesse folle - un geste d’impuissance - imagination débordante - jeter un coup d’œil - petite cagnotte - épaules étroites - moindre faux pas.

    - Mots ou expressions : avoir à la bonne - la fin des haricots – vinasse - incidence - journal.

    - et/ou Thème : Avenir

    ***

    Un soir au cirque

    J'ai mon billet, enfin !  Au milieu de la file, je me dirige vers la lumière sous le chapiteau. Elle m'attire irrésistiblement, tout comme la musique entrainante. Je suis toujours aussi inexplicablement fébrile. Mes jambes flageolantes me portent malgré moi. Si je m'écroulais maintenant, terrassée par un mélange d'attente et d'angoisse, toute personne qui se porterait à mon secours, ne pourrait que dire : "Pas étonnant qu'elle soit tombée dans les pommes, son cœur battait à une vitesse folle ! "

    Je dois me calmer ! Je vais juste jeter un coup d’œil puis je sortirai. Derrière moi, un homme me serre d'un peu trop près. Il sent la vinasse et le tabac froid. Ecœurant !

    - Eh faut s'bouger ma p'tite dame, sinon ça va commencer sans nous.

    J'esquisse un geste d'impuissance pour lui montrer que je ne peux aller plus vite. Il prend ça pour une invite ce porc et il se colle encore plus à moi. Nul besoin d'être doté d'une imagination débordante pour deviner ses intentions salaces ! Je presse le pas, quitte à bousculer un peu la femme qui me précède. Magnanime, elle me laisse passer. Elle doit connaître le triste sire !

    Ouf ! Me voici à l'intérieur. Un circassien vêtu d'une veste rouge me prend par le bras et me guide vers une place libre au deuxième rang . Pas le temps de réagir, me voilà assise. Sans me demander mon avis, il se pose à côté de moi.

    - Mieux vaut qu'il ne vous voit pas tout de suite ! Découvrir votre joli minois au premier rang pourrait avoir une incidence fâcheuse sur le déroulement de son numéro ! Le moindre faux pas lui serait fatal ! C'est qu'il semble vous avoir à la bonne et pas qu'un peu croyez-moi ! S'il tombe, c'est la fin des haricots pour lui. Vous savez qu'il ne parle que de vous depuis qu'il vous a rencontrée ! C'est un gars bien notre Tonio. Voilà des années qu'il se constitue une belle petite cagnotte pour assurer son avenir ! Et comme son avenir, c'est vous...Ma faute aussi ! Depuis que je lui ai montré votre photo dans le journal, après le drame que vous savez et que je lui ai prédit que vous étiez la femme de sa vie, il ne pense plus qu'à ça ! Bon, le spectacle va commencer, j'y vais ! 

    Il a débité son laïus d'une traite le fourbe, avec cet accent indéfinissable et charmant qu'ont beaucoup de gens du voyage.

    Roulement de tambour. Les projecteurs éclairent un câble tendu à quelques bons mètres au-dessus de la piste... Grandiloquent, l'homme à la veste rouge annonce :

    -Mesdames et messieurs, spectateurs petits et grands, retenez votre souffle pour Tonio, le plus extraordinaire des funambules du monde !

    Il n'a pas les épaules étroites celui qui s'avance sur la sciure de la piste, souple et musclé, sobre dans son justaucorps noir. Il n'a plus rien à voir avec le clown  en costume bariolé qui m'a demandée en mariage ce matin. Pourtant c'est bien lui, ce magnifique athlète qui s'apprête à défier les lois de l'équilibre.

    17/10/2022

    ©A-M Lejeune

     

     

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    Proposition n°41

    - Phrases : passer un coup de fil - en guise d’excuse - sur un autre plan - Être un peu stone - une fleur - un si grand jour - claquer la porte avec furie

    - Mots ou expressions : filer un mauvais coton - se casser la nénette – caprices – chinoiserie – dot.

    - et/ou Thème : Coup de foudre

    ***

    Fébrilité

    A moins d'être un peu stone, ce qui semble peu probable pour qui me connaît, je suis en train de filer un mauvais coton ! C'est ce que me dirait ma très chère tantine si elle me voyait dans cet état de fébrilité. Et fébrile je le suis depuis le passage de cette espèce de clown grotesque devant ma petite école. Un aliéné mental, à n'en pas douter, puisqu'il est certain, sans jamais m'avoir rencontrée auparavant, que je lui suis destinée. Pire que ça, en guise d'excuse pour me demander de l'épouser, il prétend que c'est un voyant qui lui a non seulement prédit notre rencontre, mais aussi notre mariage et nos futurs enfants ! Un comble puisque je suis incapable de concevoir ! J'étais tellement en colère, que si je n'avais pas été dehors, j'aurais pu claquer la porte avec furie au nez de cet abruti ! Il ne peut en vouloir à ma dot, je suis tout sauf riche. Une chinoiserie de plus dans ma vie déjà bien compliquée , voilà ce qu'il représente ce clown de pacotille !

    Mais les caprices du destin sont impénétrables, j'en ai eu a preuve à la fin de ma journée de classe quand j'ai décidé de passer un coup de fil à Hermine pour lui raconter ma mésaventure. J'aurais dû me douter de sa réaction. Cette femme est une fleur bleue invétérée ! A quoi sert de se casser la nénette avec ce genre de personne toujours prête à croire aux contes de fée ?

    - Tu te rends compte ? Ai-je conclu en lui narrant le départ granguignolesque de l'individu après ses assertions fantaisistes.

    - C'est vrai que ça peut paraître un peu bizarre, mais si on se place sur un autre plan, il faut avouer que belle comme tu es, tu as tout pour susciter le méga coup de foudre ma chérie !

    - Enfin tantine, j'ai 35 balais, je suis loin d'être un prix de beauté et on ne tombe pas amoureux comme ça, au premier regard de toute façon !

    Sitôt ces mots lâchés, je me suis mordu la langue. Pas besoin de l'avoir en face de moi pour deviner qu'elle aussi s'est mordu la langue pour ne pas me répondre. Valentin... Un seul regard nous avait suffi... Cette rencontre unique aurait pu être un si grand jour pour nous deux ! Mais le destin en a décidé autrement. Et voilà qu'il me fait un nouveau signe, selon Hermine.

    -Va au cirque ce soir ! Tu en auras le cœur net !

    J'ai suivi son conseil. Je suis devant le guichet. Voilà pourquoi je suis fébrile. La queue n'est pas très longue,... Je n'aurai pas longtemps à attendre.

    17/10/2022

    ©A(M Lejeune

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    L'atelier de Nanou

    Proposition n°40

    - Phrases : le verre de l’amitié – net et précis – un coup de feu – d’arrache-pied – assis sur une pierre – administrer une gifle – mon maître est un génie -

    - Mots ou expressions : enfant de la balle – rouler dans la farine – monde – donner – vaillante.

    - et/ou Thème : mariage

    ***

    NB : une fois de plus , veuillez excuser la longueur du texte, chapitre de feuilleton oblige. Il est en effet difficile de faire évoluer une histoire en seulement quelques lignes, tout en y incluant à bon escient les propositions du défi. D'avance merci de votre compréhension. Bonne lecture

    Anne-Marie

    Un drôle d'olibrius

    Demain c'est la rentrée des classes. Demain commence ma nouvelle vie, celle qui me fera oublier la précédente, interrompue brutalement par un coup de feu mortel. Déjà le visage de Valentin s'estompe. Il ne sera bientôt plus qu'un vague souvenir. Il en est ainsi depuis que le monde est monde, si tout ne s'efface pas vraiment, tout passe et c'est bien ainsi. Je vais reprendre avec plaisir mon vrai rôle de professeur des écoles.

    Au cours de la dernière semaine d'août, après avoir enfin reçu de l'Académie la confirmation de ma nomination en tant que directrice et enseignante de la classe unique du village, ma tante et moi nous avons travaillé d'arrache-pied pour rendre accueillante cette minuscule école un brin désuète. Vaillante, ma tantine n'a pas ménagé sa peine. Ménage, peinture, bricolage déco...rien ne lui résiste !

    Aujourd'hui, c'est la pré rentrée. Je suis prête à accueillir les parents de mes futurs petits élèves. Pas question de leur donner la moindre occasion de critiquer la nouvelle institutrice -directrice. J'ai préparé avec soin le verre de l'amitié auquel je les ai conviés pour me présenter à eux.

    L'heure tourne, presque midi. Je ne vois personne arriver. Seul un drôle d'olibrius s'est pointé, vêtu de ce qui ressemble à un costume de clown bariolé ! Assis sur une pierre, il attend je ne sais quoi. C'est clair, net et précis, les parents du village me boudent et celui-là semble être du genre à me rouler dans la farine, comme dirait Hermine ! Je sors, énervée plus que de raison, prête à en découdre avec ce type bizarre. Loin de le désarmer, mon air furax le fait sourire.

    -Bonjour ! Madame ? Mademoiselle ? Vous êtes bien jolie ! Voulez vous m'épouser? Me lance -t-il sans préambule !

    Sous le choc, je me retiens de justesse de lui administrer une gifle retentissante. Ce qui m'en a empêchée, ce sont ces premiers mots. Ceux-là même qu'a utilisés Valentin pour me saluer, juste avant d'être fauché par la balle meurtrière. J'en oublierais presque sa demande en mariage aussi cavalière qu'incongrue ! Rejetant loin de moi ces pensées inopportunes, je demande sèchement ;

    - A qui ai-je l'honneur ? Parent d'élève ? Échappé d'un cirque ?

    -Vous ne croyez pas si bien dire ! Je suis un enfant de la balle. Notre petit chapiteau est planté sur la place ! Vous ne l'avez pas vu ? A part ça, voulez-vous m'épouser ?

    - Vous êtes dingue ! Dites-moi pourquoi vous êtes là, qu'on en finisse avec vos pitreries !

    - Mon maître est un génie ! Il m'avait prévenu que vous réagiriez ainsi !

    -Votre maître ?

    - Oui, il est voyant ! Il m'a prédit qu'aujourd'hui j'allais rencontrer la femme de ma vie. C'est la nouvelle institutrice m'a-t-il dit. Elle n'est pas d'un abord facile ! Il a ajouté que par deux fois vous aviez souffert, que vous en gardiez de profondes cicatrices et un lourd secret lié à votre premier amour. Un secret , a-t-il conclu, qui vous ferait repousser ma demande en mariage !

    -Il est aussi barge que vous ce bonhomme ! Fichez- moi la paix et allez faire vos cabrioles ailleurs !

    -Un dernier mot, mademoiselle, vous aurez des enfants ! C'est ce qu'il m'a demandé de vous dire. Et c'est ensemble que nous les ferons.

    Je reste là, estomaquée, tandis qu'après une roue impeccable, il s'éloigne en chantant à tue tête : " Si tu ne m'aimes pas je t'aime et si je t'aime prends garde à toi !"

    Je n'ai pas dit à tant Hermine que ma fausse couche, il y a 20 ans, s'est très mal passée et qu'elle a causé des dommages irréparables à mon utérus, me rendant stérile.

    31/08/2022

    ©A-M Lejeune

     

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